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Toulon aux Couleurs
6 mars 2009

Extraits!

Cette France, il en a rêvé et convaincu il était qu'il la foulerait un jour. Il était convaincu que son natal n'avait pas d'égal en demeure, en cadre de vie. Il était convaincu que la charge nostalgique qui s'y trouvait et qui l'attachait à ce natal il ne la trouverait nulle part ailleurs. Pourtant, il était de bon aloi de s'en aller. Ainsi se disait-il, partir car il le fallait, car il avait atteint l'âge. Il devait s'en aller, non point parce que son natal l'y contraignait, mais parce que sa condition d'homme l'imposait, dans la droite ligne de son accomplissement.

On dit accomplissement il faut penser parvenir, à l'image de ce stade tant vanté par tout expatrié : l'être parvenu, signe de prestige pour soi et les siens. Un état de fait, source de la saignée dont la mère Afrique souffre depuis si longtemps.

Le Samba de l'aventure ambiguë, l'aîné, lui était parfaitement enraciné. Son être était imbibé des sources de la tradition diallobé. Il partait à la rencontre de l'altérité fort de la force symbolique de sa tradition. Demba, lui, se disait que son initiation était incomplète, voire à parfaire. Il n'était pas enraciné, se disait-il. Ainsi, se définissait-il comme un hybride culturel. Ecartelé il était entre son pulaar, le wolof et le français. A peine sevré était-il transporté dans cette ville où il devait entrer à l'école française. Ainsi devait-il s'ingénier à parler le français à l'école, se  faire comprendre en wolof par ses camarades de jeu et converser en pulaar une fois au foyer familial. Son quotidien était polyglotte, mais surtout marqué du sceau du proscrit au point qu'il était écartelé entre l'amour de l'une ou l'autre des langues. Proscrit car à l'école le symbole lui interdisait de prononcer un mot de son parler local, ainsi s'ingéniait-il dans l'usage du français. Une fois avec ses camarades, Demba devait –il pour se faire comprendre converser en wolof car son parler maternel entraînait l'hilarité de ses camarades.

Ainsi, à la différence de Samba, l'aîné et le dépositaire du temple, Demba lui est un hybride, le "Ndioundou Diéri" objet de tous les sarcasmes. Cet hybride a grandi ailleurs que dans le cercle de la famille, ailleurs que dans le natal lieu par essence de transmission de la tradition. Cet hybride a grandi avec l'autre, a subi son influence, sans jamais être entièrement comme lui, tout en perdant du sien essentiel. Tel est le drame de cet hybride.

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